C’est la fin de l’année, l’écritoire est rangé, les plumes d’oie aussi… je pensais à cela en me rendant à cette dernière séance…

Je n’ai pas réussi à faire un écrit sur le thème de l’escalier et je traine depuis cette séance une impression d’inachevé… Laissons venir !...

L’escalier... des escaliers en surimpression… ils font une gigantesque Tour de Babel qui monte au ciel… Escalier de ma maison d’enfance aux marches creuses, la septième grinçait toujours et on atteignait le palier par une marche plus haute !...il fallait la mémoire des pas pour que le pied se lève dans le bon angle… Escalier de pierres empilées tout au haut d’un temple Bouddhiste au Sri Lanka… mon dernier souvenir d’escalier… il fait une chaleur lourde et humide, le ciel est plombé, les marches glissent…

Et je dis à ma compagne d'Écritoire qui me mène à l’atelier : « ces histoires d’escalier ça t inspire ? »  Nous faisons des variations sur « nos » escaliers… appels de souvenirs… c’est une grande randonneuse et elle me raconte ses escaliers et ses passages périlleux.

 

Passages périlleux…Voyons, voyons !

« Les ponts de singe ? Ils se terminent souvent par des lattes clouées destinées à rattraper le niveau et elle me dit : une fois, j’ai cru que j’y restais ! Les deux marches à l’arrivée du pont étaient pourries, elles se sont fendues devant moi ; j’ai vu le torrent dessous, les pierres dans l’écume de l’eau… je ne sais pas comment j’ai fait pour sauter au bord ? Le soulagement !!!

C’était dans les Pyrénées sur un Gave. Depuis, ils ont construit un vrai pont. « Tout est bien qui finit bien »

Qui finit bien…

Et je pense à ces moments périlleux où il faut à la fois se lancer et prendre des précautions ; je me dis : écrire, c’est un peu pareil ; on s’aventure sur le pont de singe qui relie les mots ; on avance pas à pas, mot à mot au milieu des pièges. Mais on avance…, on se lance… Le pont des mots tangue, nous balance !! Nous finissons à grand peine par nous stabiliser !  Il nous faut l’adresse du singe et la prudence du serpent. Au-dessous de nous, ça bouillonne comme l’écume du torrent et nous passons. C’est alors qu’on mesure le chemin parcouru et on le laisse derrière soi, ce texte qui nous a fait vivre une aventure…

On l’abandonne au lecteur. Il ne nous appartient plus ! Il est enfin sur la terre ferme, comme ma compagne d’écritoire sur son chemin Pyrénéen.

Voilà à quoi je songeais en allant vers l’Écritoire. Arrivée au Château, je retrouve mes chers compagnons.  Chacun sur son chemin périlleux. Mais nos sentiers se croisent. Thème optimiste : «tout est bien qui finit bien ». Par les grandes fenêtres, on voit le soir tomber doucement… une belle journée paisible qui s’éteint dans la lumière dorée. Dans notre petite assemblée, je me sens portée par cette recherche d’écriture qui nous relie dans un élan commun et fraternel. L’Écritoire nous apporte cette mobilisation créative que chacun tire du fond de lui-même. Je retrouve les échos de traversées musicales mémorables…

A l écritoire, on ne fait pas qu’écrire, on partage aussi un repas où chacun apporte un peu de lui-même comme au pique-nique improvisé de la randonnée Pyrénéenne.

Ce dernier soir de l’année d’écriture…   Au menu de notre assemblée gastronomico-littéraire, il y a des truites en gelée… les belles truites furtives des Gaves Pyrénéens qui se sont faufilées dans cette rêverie sur l’acte d’écrire aussi insaisissable et furtif qu’elles et tout aussi captivant.

 

 

 

La Tremblade, le 8 Juillet 2015.