On nous signale un cambriolage probable au 23 rue du Champ l’oiseau. Prière de se rendre sur place pour la voiture la plus proche de cette adresse, confirmez votre démarche !

 

-       Voiture 14 : Selim, OK, je fonce, suis à 5 minutes.

-       Ici le commissaire, Selim y a un problème, comprenez moi le maire vient de m’appeler et il ne voudrait pas que l’on croit à une provocation.

-       C’est quoi ces embrouilles, je suis le plus près je fonce, point barre.

-       C’est chez le président de défense des riverains de la rue du Champ l’oiseau que vous vous rendez…Vous commencez à comprendre.

 

De rage Selim coupa la radio, ils allaient encore lui faire le coup du policier d’origine arabe, qui exacerbait les tensions intercommunautaires. Eh bien lui les tensions, il n’en avait rien à cirer, il y avait un boulot à faire, il le ferait un point c’est tout.

 

Chez les Chandlers, la situation n’était pas plus simple à gérer, monsieur et madame Chandlers pour l’état civil, Laurent et Mathilde pour l’intimité, se trouvaient être dans un état de tension proche de l’infarctus pour monsieur, et de la crise de nerfs pour madame.

 

-       Je t’avais bien dit qu’avec l’installation de ces résidences il fallait que tu fasses poser un système d’alarme antivol, mais monsieur « je sais tout » a créé son association de riverains pour en être président et paf nous sommes cambriolés, ah elle est belle et efficace ton association, j’espère que tu as apprécié les résultats !

 

Pendant cinq ans, ce programme très important de construction de résidences avait défrayé les chroniques locales. On peut même dire que ce dossier avait fait les dernières élections municipales, le maire en poste n’en était pas peu fier. Sa devise : « Aller de l’avant, vivre avec son temps »

L’ouest de la ville, là où ils vivaient, était comme en région parisienne le quartier huppé de la ville, on y trouvait des ensembles pavillonnaires construits à différentes époques, mais plus particulièrement pendant les trente glorieuses, d’où un résultat d’un certain standing et d’une certaine recherche.

A la longue le paysage des débuts, avec espaces verts et contres allées avait disparu et commençait à ne plus ressembler à grand-chose.

Les modes et les besoins avaient changé, le pouvoir d’achat n’était plus ce qu’il était, et il fallait bien penser à loger quelque part les adeptes du vivre en pavillon, qui recherchaient une ville moyenne au prix du mètre carré plus accessible. Ne voulant pas recommencer les erreurs de ghettoïsation des organisateurs du passé et au nom de la mixité sociale, le plan d’urbanisme de la ville avait été revu.

A l’Est, impossible de construire, le projet d’extension urbanistique se heurtant à la ligne de chemin de fer et à l’autoroute, construire au-delà n’aurait eu aucun sens au dire des urbanistes qui s’étaient penchés sur le dossier, il y aurait eu deux villes, sans centre et sans âme.

Au Sud c’est le fleuve qui entravait les projets de progression, et construire des ponts de liaison pour désenclaver les nouveaux quartiers était hors de portée des moyens que pouvaient mobiliser les finances locales et régionales.

Au Nord, un choix totalement irrationnel et irréversible avait été fait par la précédente municipalité. Ils avaient implanté sur le meilleur site, la zone industrielle et les espaces commerciaux.

Tout le monde faisant mine d’oublier aujourd’hui, que c’était alors pour profiter au mieux de la bretelle de la nouvelle autoroute. Bref il n’y avait plus qu’un choix possible, construire à l’Ouest au-delà de la zone pavillonnaire.

C’en fut terminé de la paix des ménages, et le début des :

 

-       Tu vois enfin la vérité en face, ce maire n’a pas de parole, il nous sacrifie, nous, les classes moyennes à ses projets pharaoniques, et en plus il le fait avec nos impôts. Désormais c’en est fini de notre tranquillité et de notre sécurité, cette rue où il ne passait qu’une dizaine de véhicules par jour en verra défiler plusieurs centaines entre le matin et le soir, et les camions poubelles, vous en avez fait le compte vous des camions…et de reprendre leurs comptes d’apothicaires !

-       Le plus préoccupant pour nous, c’est la perte de valeur patrimoniale, revendre sa maison reviendra à se suicider économiquement, ils s’en foutent les décideurs tout ce qui les intéresse c’est de faire du chiffre…et le maire, du moment qu’on l’arrose il est comme les cornichons dans mon jardin.

 

Diatribes, lettres ouvertes, sit-in, lettres anonymes et tracts crapuleux, insultes peinturlurées sur les murs et sur les routes, il y eut même une visite de Fr3 Région qui vint pour faire un reportage sur ce conflit grandguignolesque.

 

Les opposants se crurent soutenues par cette action et vidèrent leur sac, la mairie fit valoir que l’une des écoles allait fermer faute d’un nombre suffisant d’élèves, et argument massue, que l’académie acceptait de sursoir à cette mesure en basant sa décision sur le dossier qui venait de lui être présenté.

Quand le reportage passa à l’antenne ce fut un moment tragique pour les opposants, du Trafalgar, du Waterloo, ils avaient été trahis, ils attendaient un allié, ils virent surgir un ennemi en la personne du journaliste qui dans son reportage les présenta comme de bons réactionnaires incapables d’intégrer les notions du bien être collectif et du bien vivre ensemble. Il y eut des menaces de représailles, alors qu’en réalité il ne se passa rien du tout et que le projet se réalisa, fin de la séquence.

Il fallut tout de même un nombre incalculable de réunions de concertation à propos de sujets divers comme : La vitesse des voitures, le bruit des camions, le fait que désormais il devenait indispensable d’avoir une police municipale, rien n’y fit l’opposition ne désarma pas en dépit de ces tentatives de conciliation, et elle avait à sa tête, le principale zélateur le bon monsieur Chandlers.

Dans un pareil contexte, vous comprendrez mieux que le maire et le commissaire de police puissent avoir des sueurs froides à l’idée de ce que venait de vivre la famille Chandlers : Cambriolage certes, mais certainement accompagné d’un viol sur leur fille. Cette dernière, Sybille 17 ans, bonne élève de terminale S au lycée Calmette, promise jusqu’à ce jour funeste à un bel avenir, si ce drame ne venait pas perturber son développement de façon brutale et irrémédiable.

 

-       Dans ce quartier il n’y a que de belles baraques, il a fallu que ce con choisisse celle là, celle de ce président ergoteux et pédant, avec son association des « Riverains de la révolte » maintenant, il va nous en faire des tonnes.

-   Pas de soucis, nous allons faire pour le mieux, je vous assure.

 

Le maire se lança alors dans une longue diatribe, d’où il ressortait que dans une affaire aussi mal engagée, il était prudent de leur envoyer un policier chevronné, une pointure, pas un inspecteur à gros sabots, des gens comme ça il fallait savoir les approcher, un peu comme dans un safari au Lion, il lui fallait un pro, on n’était pas non plus chez n’importe qui, alors un éduqué, qui savait décortiquer sa sole avec une fourchette à poisson.

Par précaution il venait en plus de passer une sérieuse engueulade au commissaire, pour lui mettre enfin dans le crâne ce que devait être une réelle politique de prévention.

Un toussotement derrière lui attira son attention. 

 

-       C’est pourquoi ?

 

Sa secrétaire se tenait devant lui, raide, un peu gauche, un dictionnaire à la main.

 

-       Tout à l’heure vous avez employé l’expression « Ce président ergoteux et pédant » Il y avait quelque chose qui me gênait dans votre expression, je me suis permis de prendre le dictionnaire, on ne dit pas ergoteux, mais ergoteur, si vous me permettez !

 

Le commissaire était prêt à voler au secours de la pauvre femme tant la réaction du maire était prévisible, sûr qu’il allait l’étrangler.

 

L’autre crétin qui envoyait Selim cher les Chandlers et maintenant cette vieille taupe qui venait lui expliquer qu’il ne savait pas s’exprimer, décidément ils avaient décidé de lui pourrir sa journée.

 

Selim ne se posait pas tant de question, il avait choisi d’être policier et il assumait son rôle ; Pour lui son teint et sa chevelure n’avaient rien à voir avec son identité professionnelle. Ses grands parents étaient kabyles et alors où était le problème, l’un de ses collègues était breton et les autres membres de l’équipe passaient leur temps à l’enquiquiner avec les bretons un peu trop amateur de souchen et qui portaient des chapeaux…, quand il en avait assez il poussait un coup de gueule et l’on passait à autre chose. Pour eux il était l’officier d’origine arabe, mot qui le mettait en colère, car il ne faut pas mélanger arabe et kabyle, c’est comme ça.

En définitive il aurait pu se faire oublier en restant dans son coin, hé bien non, lui il avait décidé qu’il serait le meilleur et il faisait tout pour le démontrer : sport à outrance, tireur d’élite, parachutiste confirmé, parlant couramment l’arabe ce qui dans son métier s’avérait parfois fort utile, mais aussi l’anglais et le kabyle.

Sorti très bien placé de l’école d’officiers de police de Canne Ecluse, il ne demandait qu’à être jugé sur ses performance alors ce que pensait le maire, il n’en avait cure, il les entendait de là où il était.

 

-       Pour une affaire aussi sensible, il faut envoyer une pointure, pas un inspecteur à gros sabots. Des gens comme eux il faut savoir les approcher. C’est comme dans un safari au lion, il faut travailler avec un pro.

-       Je vous prie de bien vouloir m’excuser, mais vous l’avez déjà dit il y a cinq minutes monsieur…

-       Et alors qu’y puis-je moi si vous ne comprenez rien, s’il faut faire redondance. Car il faut bien le reconnaître, malgré mes mises en garde, vous n’avez rien fait, désormais le mal est fait, et moi je joue ma réélection sur une bavure !

 

Assise sur le canapé, Mathilde sanglotait, déjà de santé fragile un choc pareil pouvait d’un seul coup la faire sombrer faute de la tuer. Son époux ne la maintenait à flot qu’à coup de cures thermales chaque printemps à Bride les bains, ce qui, entre nous, lui coutait une fortune. Je devrais peut-être envoyer la facture au maire lui qui a ruiné notre situation se disait-il.

Encore que ce mois d’absence de sa femme lui permette tout de même de souffler un peu, il faut avouer que ce n’était déjà pas rien.

 

En ce levant ce matin, veille du jour de retour de ses parents partis au chevet de la grand-mère paternel, Sybille n’avait pu que constater les dégâts, sur l’instant elle avait rit à gorge déployée, imaginant la tête des parents devant un tel spectacle.

Puis les minutes passant, elle avait commencé à prendre conscience de l’étendue des destructions et qui dit destruction dit irréparable. La croûte peinte par un arrière grand père, que tout le monde détestait tant elle était moche, mais qui restait là à trôner au dessus de la cheminée par piété filiale avait chu s’empalant sur la pelle à feu se déchirant ainsi sur toute sa hauteur. Les petits personnages en porcelaine de Sèvres qui ornaient le dessus du buffet et y faisait la gloire de sa mère avaient tenté de prendre leur envol, mais rattrapés par le principe de gravité ils gisaient aux quatre coins de la pièce la mine forte déconfite, et ainsi de suite, se promenant de pièces en pièces elle put s’apercevoir que pas une n’avait échappé au tsunami. Dans le salon par exemple les rideaux en filet qui donnaient tout le charme à la pièce en tamisant la lumière étaient tout écharouillés comme si un animal de grande taille s’en était servi pour grimper le long des murs, les embrases étaient arrachées, et ils pendaient au trois quart, leur tringle de support ayant cédé…Yaourts collés au plafond de la cuisine, baignoire débordée dans laquelle flottaient le linge de toilette et divers flacons…La catastrophe la plus totale.

Le temps passant deux problèmes commencèrent à la tarabuster :

 

1   Elle ne se rappelait de rien, et n’avait rien entendu, alors qu’elle n’avait pas quitté la maison !

2   Elle ne disposait que d’une journée pour remettre tout en état avant le retour des parents, et il y avait tant de destructions irréversibles qu’elle ne savait pas où commencer pour s’en sortir, ni à qui s’adresser pour recevoir de l’aide.

 

S’il n’y avait eu que ça à résoudre, c’était déjà beaucoup, mais quand le sort s’acharne, elle allait avoir la surprise de sa vie dans les minutes à venir.

Elle avait décidé de se faire un thé, ce qu’elle fini par réaliser, après avoir dû surmonter bien des difficultés en raison de l’état des lieux, pour retrouver théière, sucre, biscottes et confiture…

Elle le dégustait tranquillement sur un coin de canapé, en croquant ses biscottes à la confiture d’orange, quand des éclats de voix attirèrent son attention, le cauchemar continuait, ce n’était pas possible, pas eux tout de même, eux qu’elle n’attendait que pour le lendemain matin.

 

-       Tu nous fais à chaque fois le même cinéma, ta mère ne va pas bien il faut y aller d’urgence, on se tape trois cents kilomètres de voiture et dès que tu es là bas, vous avez une prise de bec, tu te vexes, tu claques la porte, et on doit rentrer, mon pauvre garçon quand seras-tu enfin adulte ?

 

Elle entendit la clé dans la serrure, un brouhaha, puis :

 

-       Tu es là ? Puis plus rien.

 

Elle ramassa sa tasse se précipita dans la cuisine rangea ce qu’elle avait utilisé pour son petit déjeuner au milieu du fatras, pour se faufiler dans sa chambre et se glisser sous sa couette. Pour une tuile c’était une tuile qu’allait-elle bien pouvoir leur raconter.

Si encore elle avait pu remettre un peu d’ordre dans tout ça, elle aurait pu broder, mais dans l’état actuel de la situation elle risquait de se retrouver en hôpital psychiatrique.

 

Après le premier choc qui les avait cloués au sol, la langue collé au palais, ils avaient pu reprendre leur progression et atteindre le séjour, au fond du lit elle avait les doigts de pieds crispés, quand le hurlement de sa mère qu’elle attendait l’atteignit en pleine tête la laissant groggy. La scène de fin du monde vient de les foudroyer.

Ils arrivèrent en courant dans sa chambre piétinant tout ce qui était sur leur parcours, elle entendit les tessons éclater, les bois craquer, ils entrèrent comme des furies dans sa chambre en criant d’un même cœur : - Ma chérie tu n’as rien, ils ne t’ont rien fait, tu n’as pas été violée au moins.

Son père qui dans sa jeunesse avait vu le film de Stanley Kubrick, Orange mécanique, en avait été traumatisé, et pour lui sa fille était une fille violée en puissance.

Il fallait qu’elle réponde quelque chose et le faire vite, mais répondre quoi ?

-       Si je leur dis que j’ai été violé je vais me retrouver à l’hôpital avec test ADN et tout le tintouin, l’avantage c’est que tout le reste passe aux pertes et profits !

-       Si je dis que nous avons été cambriolé, ils vont très vite s’apercevoir que beaucoup d’objets sont jetés en vrac d’autres brisés, mais qu’il ne manque rien.

 

Les visages de ses parents étaient effrayant : celui de sa mère mince et pâle avec l’arête du nez saillante, ses yeux d’un bleu délavé sous des cils presque inexistants à force d’avoir été épilés que seul un trait de crayon signalait, ses pommettes hautes qui lui donnaient un charme slave qu’elle faisait habituellement ressortir avec un peu de blush paraissaient ce matin grises et osseuses et la fossette qui égayait sa joue semblait creuse et triste dévorée par l’anxiété. Son père ne tenait pas en place, semblait avoir le visage habité de l’intérieur, tant il était plein de tics, l’une de ses paupière battait vivement comme à chaque fois qu’il était énervé, il se mordait l’intérieur des joues pour s’empêcher de parler, la peau de son visage était marquée de plaques rouges qui contrastaient avec sa pâleur. Ce matin il s’était raté au rasage, semblant avoir été interrompu en cour d’opération, l’un des côtés, le gauche était pratiquement rasé tandis que le droit gardait des plaques de barbe intacte, sa demi moustache était la plus comique, mais ce n’était peut être pas le moment de mettre ça sur le tapis.

Ses yeux parcourraient la chambre et elle comprit que d’un instant à l’autre il allait lui poser des questions à la raison que c’était la seule pièce intacte de tout le pavillon !

 

-       Si je leur dis que j’étais absente et qu’à mon retour j’ai trouvé la maison dans cet état, je vais me prendre une paire de calottes.

-       C’est tout ce que tu as à nous dire rugit son père, la peur pour les siens le rendait hystérique. Tu les as laissés rentrer malgré nos recommandations hein, tu n’écoutes rien, tu n’en fais qu’à ta tête, avec tous les sacrifices que nous faisons pour toi, c’est incroyable, regarde l’état de ta mère, tu es consciente du mal que tu lui as fait.

-       S’ils commencent à utiliser ce style d’argumentaire, il faut mettre fin à la discussion rapidement, ou, on va s’embourber dans les débats pas clairs et pour longtemps.

 

La phrase est sortie toute seule sans qu’elle ait eu le temps d’y réfléchir :

 

-       Je cherchais mon bikini pour aller à la piscine, et comme je ne le trouvais pas je me suis énervée, c’est de votre faute aussi, si vous ne me l’aviez pas caché !

 

Sous le choc le père s’est laissé tomber sur le petit fauteuil Crapaud qu’il a failli briser, lui qui a échappé au massacre, sa mère toujours plantée au pied du lit n’a pas pu réprimer un cri d’animal blessé et depuis elle pleure en silence.

 

Pourquoi avoir utilisé ce mot décalé, connoté années cinquante, l’atoll de Bikini et ses explosions terrifiantes transformé en maillot érotique vanté par BB et chanté par Dalida.

Puis le lien se fait, c’est sa tante la sœur de sa mère, celle qui lui raconte des histoires sur sa jeunesse endiablée, elle avait la réputation de porter ce style de maillot que beaucoup considéraient comme dévergondé, ce qui énervait sa sœur. Dans la tradition familiale sa mère s’empressait d’ajouter, le Bikini ce n’était rien si encore elle l’avait un peu plus souvent gardé sur elle, ce qui sous entendait que...

 

Ils ne disent plus rien personne n’ose bouger de peur de rompre l’équilibre précaire dans lequel ils se sont installés. Ils se regardent, la regarde et se regardent à nouveau, le moment de l’apocalypse est arrivé.

Il y a des jours où il faut savoir accepter son sort et Sybille avait décidé de s’y résigner quand un long coup de sonnette retentit.

La mère se mit à hurler : - Ils reviennent !

Le père le ton péremptoire : - Ne dit pas n’importe quoi, ils ne se donneraient pas la peine de sonner !

 

 

 

 

Police nationale, il y a quelqu’un ?

 

-       Bonjour Madame, mademoiselle monsieur, c’est bien d’ici qu’on nous a appelés pour un cambriolage ? Sa voix s’était éteinte à la vue du spectacle qu’il découvrait en les suivant à travers le pavillon.

 

Non de non, ils ont eu affaire à des furieux, le patron a raison c’est certainement une histoire de vengeance. Il avait placé un agent à la porte d’entrée à qui il demanda d’appeler le commissariat pour qu’on fasse venir la police scientifique, il devait y avoir pas mal d’empruntes à relever.

Au passage il salua la mère qui pleurait toujours, aperçut la fille dans sa chambre qui ne disait mot et suivit le père dans ce qui devait être son bureau. Le lieu n’avait pas été mis à sac, ce qui étonna le policier, c’est que je le ferme à clé s’empressa de lui préciser son hôte.

 

-       Asseyez-vous, je dois vous informer de deux ou trois choses avant que vous n’alliez plus avant dans vos constatations.

 

En fait il ne fit que corroborer tout ce que lui avait dit en light le commissaire par radio, mais lui ce fut du heavy. Il se tint coi attendant que l’on en arrive à des faits avérés, voyant que cela risquait de prendre du temps, il l’interrompit tranquillement, lui demandant d’en revenir aux faits.

 

-       Ma fille tient des propos incohérents, je dois vous avouer que je crains qu’elle n’ait été violée et que le choc ne lui ait dérangé l’esprit, ça doit rester entre nous n’est-ce pas !

-       Nous allons voir ça avec elle et faire venir une ambulance …Mais avez-vous des éléments susceptibles de nous apporter des éléments de piste ?

-       Nous avons nos ennemis en lien avec les menées du maire, une petite bonne dont nous ne connaissons pas les fréquentations, un plombier qui est venu il y a quinze jours accompagné d’un apprenti pas de chez nous il allait ajouter vous voyez ce que je veux dire quand relevant la tête il prit conscience de sa bêtise et il se tut.

 

Ils échangèrent sur la façon dont les opérations allaient se dérouler et le fait qu’ils allaient devoir quitter la maison le temps que l’équipe scientifique ait fait ses relevés…

 

-       Au fait quels sont les propos de votre fille qui vous donnent à penser qu’elle ait pu subir des violences ?

-       C’est un peu difficile à dire, vous allez trouver ça ridicule, elle nous a dit que c’est en cherchant son maillot de bain qu’elle avait mis la maison dans cet état rendue furieuse de ne pas réussir à le trouver…

-       Et le viol que vient-il faire là dedans ?

-       L’incongruité du propos, vous comprenez ?

 

Pas vraiment, mais il venait de trouver une première brèche.

Il refit tranquillement le tour de la maison dictant sur un enregistreur tout ce qui paressait important, le type des objets détruits, les sens de projection. Il ressortit pour faire le tour de la maison, examinant avec soin toutes les ouvertures y recherchant les traces d’une effraction. Il focalisa son approche sur la porte d’entrée et sa serrure, aucune trace de forçage, ni griffure indiquant une tentative de crochetage, donc ils étaient entrés par la porte ou on les avait laissé rentrer.

Il avait volontairement contourné la chambre de la fille sans y pénétrer, préférant la laisser attendre dans son jus, jargon de policier qui sous entend laisser mariner pour être à point au moment de la discussion.

Il savait déjà qu’il n’y avait pas eu vol d’objets de valeur, si non on lui en aurait parlé d’emblé, et il avait vu le coffre dans le bureau, restait donc la fille et sa chambre miraculeusement préservée.   

Sybille ne mijotait pas dans son jus, après le passage du policier elle s’était levée rapidement pour s’habiller avant de le revoir, ce qui n’allait pas manquer de se produire, et c’était là tout le hic. Elle avait de la chance, il était classe et avait un visage avenant pour ne pas dire plus, autre chose que ses copains de lycée qui à ses côtés auraient fait bien pâle figure.

Il entra dans la chambre, de la main il intima aux parents de rester à l’extérieur et il ferma la porte. Il sortit son dictaphone de sa poche, il l’avait déjà utilisé dans toutes les pièces de la maison pour noter ses commentaires au fil de sa visite.

Il se saisit de la chaise qui se trouvait devant l’ordinateur, s’assit à califourchon et dit et alors ?

-       Qu’avez-vous à me raconter que je ne sache déjà ?

-       Comment ça déjà ?

 

Comme il ne répondait pas, elle se lança dans de longues explications embrouillées, dont de primes abords il ne ressortait rien.

 

-       Soyez claire et précise, c’est pour la transcription, si vous mâchez les mots je ne vais rien y comprendre.

-       Je ne sais pas comment vous raconter ce qui c’est passé, c’est inimaginable et en quelque sorte très privé !

 

Elle n’avait donc pas été violée, rassurant, mais elle n’arrivait toujours pas à tout dire, il se dit qu’il fallait qu’il l’aide un peu.

 

-       Je vais placer la bonne de vos parents en garde à vue, ainsi que le jeune apprenti du plombier ? je suis persuadé qu’en moins de 24 heures ils auront tout raconté. Elle lui avait certainement donné la clé, c’est toujours comme ça dans les films.

 

Au bord du lit Sybille sentit une boule se former dans sa gorge et les larmes commencèrent à lui rouler sur les joues.

 

-       Comment vous avez su pour la clé ?

-       Simple, il n’y a pas eu effraction.

-       Vous n’allez pas les arrêter, ils n’y sont pour rien.

-       Voyez vous ça mademoiselle je sais tout.

 

Commença alors l’histoire d’une relation privilégiée avec une tante, tare de la famille mais qui était très proche d’elle et qui l’avait toujours accompagnée en secret. C’est elle qui était sa confidente, qui l’avait emmenée chez sa gynéco et l’avait conseillée à propos des garçons et de la sexualité. Elle lui avait expliqué que pour une première fois ce n’était pas la beauté du garçon qui importait mais sa douceur et sa gentillesse.

Il fallait qu’ils aient un endroit tranquille, et que les parents soient le plus loin possible.

 

Les parents étaient partis pour plusieurs jours chez la grand-mère, la maison était vide, elle son copain étaient très apeurés mais prêt à passer à l’acte…

 

-       Et alors qu’est-ce qui a foiré ?

-       Je lui avais dis que j’avais un peu peur, alors il avait apporté des pilules censées nous mettre en forme et nous comment dire ?

-       Désinhiber, c’est le terme consacré.

 

Après elle ne se souvenait plus de rien, quand elle s’était réveillée, il était parti l’abandonnant à ses malheurs dans cette maison à l’état pitoyable.

 

-       Je vois, LSD ou une variante, c’est vrai que ça arrache, vous en aviez pris combien ?

-       Deux…

-       Il est malade ce gamin il me faudra son nom !

 

Ils eurent un long conciliabule ? Dans la pièce à côté les parents faisaient les cents pas, morts d’angoisse.

Quand ils eurent appris que leur fille n’avait subi aucune violence autre que d’avoir trop bu, qu’elle n’avait fait que d’amener à la maison des copains peu recommandables en dépit des injonctions reçus, ils furent si heureux que tout le reste passa sans problème.

 

-       Vous jeune fille vous n’oubliez pas de passer au poste signer votre procès verbal !

 

Ici voiture 14 : Allo la base ici Selim, affaire réglée, ce n’était qu’un déclanchement intempestif d’alarme anti vol, il n’y a pas de problème !

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Atelier du 26 mars - 7ème séance de l'année

A partir du fait divers ci-dessous, écrire une nouvelle :

« Ado bordélique

C'est en cherchant son bikini, et certainement en galérant à le trouver, qu'une jeune fille de 16 ans a littéralement mis à sac sa maison.

Sa mère avait signalé un cambriolage à son retour. L'ado a expliqué la situation aux policiers qui enquêtaient sur le moyen utilisé par les cambrioleurs pour rentrer sans effraction. La jeune fille a également avoué ne pas s'être rendu compte du bordel qu'elle avait fait... verres cassés, meubles retournés... »

 

Angles d’écriture à déterminer avant d’écrire :

-       Le ou les points de vue : la mère, la jeune fille, le père, un policier, un journaliste…

-       Le moment de la narration : pendant les faits (différents temps selon le point de vue), après les faits (id), avant (l’arrivée de la fille, de la mère…)

-       Le lieu

-       Le milieu social

-       L’époque