Un automne en Cévennes

 

 

 

       Quand vous avez travaillé et vécu toute votre vie dans une combe verdoyante, à l’écart du monde et de ses excès il vous paraitrait normal que l’ensemble du pays soit à l’image de votre coin de campagne.

Après une journée de marche harassante sous le soleil ardant, être passé par le col de Porte au pied de son château, Jean Louis avait découvert qu’en réalité il n’en était rien, plus il s’approchait de la Grand Combe, plus les paysage se transformaient.

Partout, sur les chemins, des muletiers conduisaient de longues cohortes d’animaux bâtés transportant le charbon : le fameux pactole. Pout lui ce n’était pas une nouveauté, des veines de charbon il en affleurait bien un peu par endroits sur les pentes du Mont Lozère, la différence c’est qu’ici pour atteindre cette richesse, on avait pelé la montagne, lui mettant les tripes à l’air en détruisant toute la végétation. Un autre phénomène perturbant se faisait jour, un grondement sourd sorti des entrailles de la terre qui venait à espaces réguliers vous secouer les tympans. L’un des muletiers surprenant son air étonné lui expliqua que ce n’était que des tirs de mines que l’on effectuait pour déloger le charbon de sa gangue de roche et de terre. Il le conduisit sur une arrête rocheuse pour lui faire constater de visu le phénomène. Ils attendirent quelques minutes, l’homme roula une cigarette qu’il lui tendit, encore une nouveauté qu’il allait devoir découvrir. Au moment où il ne s’y attendait plus, il crut avoir une vision, le flan de la montagne en face d’eux, se gonfla comme une baudruche, ce qui heureusement lui fit ouvrir grand la bouche et lui évita de trop faire souffrir ses tympans, puis la déflagration arriva tandis que là-bas les masses de charbon et de roches retombaient dans un nuage de poussière et de grondements. Ce n’est qu’à cet instant précis qu’il commença à entr’apercevoir qu’il avait peut-être perdu au change en passant le col, quittant les vertes montagnes des hautes vallées pour l’enfer.

 

A droite, à perte de vue des pentes couvertes de châtaigniers, à gauche, d’autres pentes couvertes de châtaigniers, en face, sur un angle de vision de presque cent quatre vingt degrés, mais rien qui vienne troubler le regard dans ce paysage pur de toute dévastation.

Sur l’arrière de la bâtisse, une prairie en pente douce montait vers le Causse.

Un œil exercé y découvrirait une petite ligne un peu plus verte que le reste de la pente, trace indiquant que là sous l’herbe coulait encore une rigole qui amenait autrefois l’eau derrière la maison.

Là où il y a maison d’homme, il y a obligatoirement de l’eau quelque part, en cherchant bien on retrouvera la citerne qui permettait de la recueillir et de tenir la vie à la saison sèche, elles ont souvent disparu sous les éboulis de murs écroulés.

Cette Bastide de proportions extraordinaires, enfin ce qu’on peut en juger à ce qu’il en reste, il est difficile de comprendre ce qui a pu amener la ruine d’une construction aussi belle et aussi fonctionnelle.

Orientée face au sud, adossée contre une butte qui la protège des vents dominants, elle était entourée de terrasses aujourd’hui enfouies sous les ronces, mais où l’on avait dû faire du jardinage, tout y était réuni pour y bien vivre, en paix, dans le calme la beauté, et la sérénité.

Le linteau de pierre au dessus de la porte d’entrée, porte gravée dans sa masse, le chiffre 1707 qui indique que cette année là, la maison avait été rebâtie.

Ce n’était pas là une simple date de convenance, mais le symbole d’une renaissance. Depuis peu les dragons du roi Soleil avaient enfin quitté les villages et les montagnes des Cévennes pour s’en aller nuire ailleurs. Il avait fallu les supporter avec leurs exactions, pillages, viols, massacres, tout ça au nom du Roi et de la religion. Le Roi voulant que ses ouailles perdues abandonnent la religion réformée pour revenir dans le sein de l’église de Rome. Rudes années, où sous une forme ou sous une autre, ils avaient résisté, le prix à payer avait été exorbitant mais le Roi avait cédé sans avoir fini de les réduire complètement.

Ici à la Bastide, ils avaient dû abandonner la maison aux officiers pour aller vivre dans les mazets où l’on enfermait habituellement les animaux. Les militaires leur   prenant tout, exigeant tout, les humiliaient à tout instant, mais jamais ils ne purent les prendre en défaut. Ils ne connaissaient pas assez bien les forêts sauvages du Causse et les petits sentiers se faufilant dans les combes. Avant de partir, pour se venger de ne pas avoir pu les tuer, ils avaient mis le feu à la maison. Heureusement, celle-ci construite avec plus de pierres que de bois n’avait pas subi trop de dégâts et ils avaient pu rapidement en reprendre possession.

Ils en avaient profité pour améliorer un peu leurs conditions de vie en créant pour chaque génération un espace particulier.

Cette pierre gravée, était la marque indélébile de leur victoire sur le sort et les avanies, la date d’une victoire chèrement payée certes, mais celle d’une année où ils avaient pu recommencé à vivre.

Pour se rendre compte de ce qu’a été leur puissance il faut venir l’hiver quand les arbres ont perdu leurs feuilles et que la végétation s’est assoupie, ou après un grand incendie de forêt.

Ces pentes que vous voyez verdoyantes vous découvrent alors ce qu’étaient les Cévennes de cette époque là, du fond des ravines à leur sommet, les pentes vous offrent alors un tout autre paysage. Comme au Vietnam ou à Bali vous découvrez que le moindre espace de terrain a été façonné par la main des hommes. Les flancs des reliefs sont couverts de stries qui se révèlent à l’observation être des terrasses, ici on n’utilisait pas ce mot, même aujourd’hui où elles disparaissent sous les ronces ou la végétation sauvage on dit encore les « Faïsses » sur lesquelles on a cultivé les châtaigniers, puis les muriers.

Le spectacle est grandiose, on a du mal à imaginer que c’est là un travail réalisé de la main des hommes, ce n’est pas possible se dit-on, ils n’ont pas pu faire un travail aussi énorme, avec leurs seules mains, des pics, des hottes et des mules pour tout engin de terrassement !

Pourtant si, des temps de l’occupation Romaine au dix neuvième siècle, ces immenses chantiers n’ont jamais cessé.

Par ici entre Génolhac et Concoules juste en dessous de la Régordane, l’antique voie romaine qui traverse toutes les Cévennes, on dit encore « Le moulin Manoël », mais avec le temps le lieu est devenu le Mas Noël un lieu dit et non plus le nom d’une grande famille disparue, qui pendant de longues années, a marqué toute la région.

Quand sont-ils arrivés en ce lieu ? Difficile à dire, il faudrait enquêter aux archives départementales et fouiller dans les fonds déposés par les notaires de ces temps là, encore faudrait-il connaître lesquels. Ce que l’on sait de façon certaine, c’est que le moulin existait au moment où les dragons de Villard envoyés par le Roi Louis le quatorzième ont sévi. Dans ces vallées de montagne reculées et sauvages, le Roi, on savait à peine qu’il existait, on y vivait si mal ! Que lorsque le Roi avait voulu les contraindre au nom de la religion, le feu de la révolte avait pris d’un seul coup dans les Causses et les villages, comme brindilles sèches dans l’âtre de la cheminée.

 

Cette famille n’étaient peut-être pas là au moment où Jules César a conquis la Gaule, ce n’est même pas certain, les Cévennes, dès cette époque, connaissaient déjà les Faïsses et ses travailleurs de force.

Un acte de mariage découvert dans les archives de la mairie de Villefort atteste qu’en 1345 un dénommé Jacques Manoël avait épousé Gertrude Olivier, que lui était propriétaire du moulin de Bouzède, et qu’elle lui apportait en douaire, des prés sur les pentes du mont Lozère, c’est la seule trace avérée de la présence de cette famille dans la région.

 

Ces gens là n’avaient pas de secret particulier pour bien cultiver la terre dans ces régions sauvages et âpres, ils savaient une chose pourtant, c’est que seul le travail et la ténacité paient et ils en avaient fait leur devise. Personne dans la famille n’y trouvait à redire, et puis à part travailler, qu’auriez-vous voulu faire, on était riche tant qu’on avait des bras.

En plus du travail de la terre, on élevait des chèvres car elles présentaient toutes les qualités requises pour vivre sur ces pentes : elles nettoyaient les espaces, de tout ce qui aurait pu gêner le travail avec les châtaigniers, dévorant ronces, fougères, même les rejets d’arbres, tout y passait, il fallait seulement protéger les jeunes plantations sur les terres juste mises en culture.

Quelquefois on découvrait une source sur un espace essarté et on y créait un nouveau lopin de potager.

Aujourd’hui tout cela peut paraître un peu étonnant ou puéril, on a le sentiment en entendant ces mots que l’on en faisait trop, alors que l’on n’en faisait pas assez.

Que croyez-vous qu’il puisse se passer lorsque l’on vit en quasi autarcie et qu’il se produit une catastrophe comme le gel des fleurs de châtaigner au printemps ?           Les châtaignes représentant la plus grosse part de l’alimentation de la famille, hum, vous ne dites rien, mais vous connaissez la réponse n’est-ce-pas ?

Les gens mouraient de faim tout simplement après avoir mangé tout ce qu’ils avaient pu arracher à la nature.

Ici rien de tout ça, on savait gérer et constituer des réserves en diversifiant les productions donc la nourriture, et en économisant les dérivés de la châtaigne comme les farines.

On ne sortait pas de l’hiver épuisés et amaigris comme des gueux, ayant vu partir tous ceux que la faim avait emportés, on possédait une force que bien peu de familles possédaient en nombre : des hommes solides et prêts à se mettre à l’ouvrage.

L’hiver est une rude saison pour ceux qui dépendent de leurs rapports avec la nature pour sauvegarder leurs vies. Non contente de vous rendre chichement le fruit de votre travail, la nature avait bien des tours dans son sac pour vous la pourrir.                     Les pluies du printemps succédant ici aux périodes de grand froids et de gel de l’hiver, on pouvait entendre à cette période de grands bruits d’effondrements les matins ou le soleil chauffait les Faïsses, accélérant le dégel, ce qui provoquait immanquablement l’effondrement de certains murs de soutènement.

Les semaines où il pleuvait sans discontinuer les problèmes étaient les mêmes, voire aussi après de violents orages. Là les conséquences étaient encore plus catastrophiques, non seulement les murs en s’écroulant pouvaient en emporter bien d’autres, en particulier dans les zones les plus pentues, mais l’eau en dévalant les pentes arrachait toute la terre arable qu’on avait pu y amener à force de ténacité et de courage.

Il fallait alors des journées d’un travail ingrat pour remonter les murs et regarnir ces espaces de terre remontée à dos d’hommes dans des hottes, et dans le meilleur des cas dans des panières amarrées sur le dos des mules.

C’était ainsi, c’était leur destin, et ils ne s’en plaignaient que rarement.

Au fil des ans, des voisins étaient partis rendant les armes, et progressivement ils avaient pu agrandir leur domaine, plus de travail, mais aussi les moyens de nourrir plus de bouches.

On avait appris à perfectionner les méthodes pour gérer ce que l’on produisait.

La clède était l’une des composantes importante de leur dispositif. Il ne suffit pas de ramasser des masses de fruits encore faut-il savoir les traiter.

En novembre et décembre commençait la période du séchage, on disposait au premier étage de la clède, sur des lattes de bois espacées de quelques centimètres une bonne couche de fruits préalablement arrachés à leur bogue. A l’étage inférieur on allumait des feux, un dans chaque coin et un au centre où l’on brûlait des souches arrachées des faïsses en hiver et des feuilles humides. Le travail durait de trois à six semaines il fallait surveiller de jour comme de nuit, brasser les fruits pour obtenir un séchage efficace, relancer les feux les yeux rougis par la fumée. Puis passer au décorticage avec les soles à piser (1) qui vous brisait les jambes

 

 

Pour en terminer venait le tour des mules qui tournaient en rond pendant des heures pour animer les meules de pierre. La farine fraiche avait des odeurs de fruits secs et de fleurs de montagne, chaque année ayant ses dominantes d’arômes particulières comme les grands crus des vignes.

 

 

 

 

1 : Soles à piser : Chaussures dont la semelle est garnie de longues pointes métalliques servant à piétiner les châtaignes sèches pour les débarrasser de leur peau

 

Le lendemain de son arrivée à la Grand Combe, il fut affecté à une brigade de ramasseurs de charbon. Ils devaient se mettre à l’abri pendant les tirs de mines et se précipiter alors que des pierres volaient encore, pour charger selon le site, soit des wagonnets, soit des bats sur le dos des mules, travail épuisant qui les laissait le soir le dos rompu et le corps noir de poussière, les doigts en sang.

 

Ils n’avaient pas perçu l’évolution de leur monde, quand un voisin abandonnait, c’était tout bon, ils récupéraient ses faïsses à bon compte et étendaient leur domaine. Ils s’étaient moqués de ceux qui se lançaient dans la culture du murier et qui devaient reconstruire toutes leurs terrasses, les arbres ayant besoin de plus de place. Ils en faisaient des gorges chaudes lors des soirées passées dans la clède 1. On poussait les châtaignes on laissait tomber les feux on s’éclairait au rouzi 2 ou avec la lampe à carbure d’un feuillardier 3 et les ombres couraient sur les murs noircis, tandis que les anciens s’amusaient à faire peur aux enfants et jeunes filles en contant des histoires épouvantables pour leur inculquer la prudence…

Il y avait un peu de vin, du pain et du fromage et les jours fastes un talon de jambon fumé au dessus des châtaignes.

 

Jean-Louis avait résisté plus longtemps que son frère, qui lui le premier avait compris que c’en était terminé de cette vie rurale de gratte terre, de mangeur de châtaignes, de mâche raves comme les appelaient ceux d’en bas. Quand la ligne de chemin de fer avait été installée de la Grand Combe à Beaucaire pour évacuer la production des mines, il avait fait son balluchon et était descendu vers Alès, en partant il avait entendu son père le maudire de son abandon, mais il était temps, ils avaient déjà bien du mal à vivre.

Pourtant cette année là l’espoir était revenu, la récolte avait été magnifique en dépit de la maladie de l’encre qui gagnait les arbres, Devant la perte de main d’œuvre, ils avaient dû trouver des astuces pendant l’hiver pour perfectionner les fourcolles 4 ces outils dont ils se servaient pour le ramassage des châtaignes et il faut dire que c’était assez réussi, le rendement avait doublé, même les enfants et les femmes pouvaient l’utiliser.

On pouvait bien les moquer, ils tenaient bon, et ils avaient un acheteur solide et fidèle qui savait évaluer le travail à sa juste valeur, n’étais-ce pas ce qui importait ?

 

La mine à ciel ouvert, c’est un travail difficile, sale où l’on s’arrache les mains. Il s’y produit nombre d’accidents qui laissent les hommes estropiés et invalides, mais là au moins, on voit le ciel. Le jour où il lui fallut se faufiler dans une galerie de mine, la terreur le prit, toute la journée il eut peur que la voûte ne les écrase ou les enferme sous la terre en s’affaissant, c’est que le boisage était rudimentaire et que ce type de catastrophe il s’en produisait presque quotidiennement, rendement oblige.

 

1 : La Clède petite construction à un étage, lieu de séchage des châtaignes.

2 : Rouzi sorte de lumignon à huile.

3 : Feuillardier homme qui travaille les rejets de Châtaignier.

4 : Fourcolles pinces à ramasser les Châtaignes.

Un soir qu’il faisait sa toilette avec ses compagnons de brigade, il entendit qu’on l’appelait : Jean Louis, un certain Arthur te demande, il sut que cette fois il était sauvé, il avait retrouvé son frère.

C’est qu’il lui en avait voulu de partir sans lui, les laissant avec un travail de tous les diables et les plus petits qu’il fallait nourrir.

 

Lui était très pauvre son frère un peu moins, ils allèrent dépenser leur maigre pécule dans l’un des cafés mis en place par la compagnie des mines pour récupérer les maigres salaires qu’elle leur versait. Le lendemain, le réveil s’avéra pénible, l’eau de vie ingurgitée en quantité leur durcissait les membres.

Arthur redescendit avec le premier train de charbon pour Beaucaire où il était lanternier pour la société des chemins de fer et lui retourna dans sa galerie à laquelle il s’était habitué. Il avait raconté à Arthur l’effondrement de leur monde et la mort de leur domaine dont leur père ne s’était pas remis.

 

Tout était prêt, les sacs de farine, ceux de châtaignes blanchies, sèches et décortiquées, ils spéculaient sur ce qu’ils allaient pouvoir en tirer pour se refaire de plusieurs saisons médiocres.

Il n’y avait pas de date précise pour le passage de leur acheteur, les denrées n’étant pas périssables il n’y avait donc pas de problème et d’où qu’ils soient à travailler il entendait toujours l’arrivée du train de mules au son des grelots que portait la bête de tête.

Après une semaine d’attente la nervosité gagna le père, la semaine suivante, il n’y tint pu, il enfila ses croquenots et prit son bâton pour monter à Villefort par la Régordane.

Rude parcours pour un homme de son âge, mais il savait que là bas il aurait des nouvelles à l’hôtel du globe où ne manquait pas de descendre son acheteur.

Il redescendit deux jours plus tard, l’air hagard de quelqu’un qui a rencontré un esprit sur le Causse…

De son acheteur il n’avait pas trouvé trace, personne n’avait de nouvelle de lui, certains le disaient mort, d’autres qu’il avait abandonné le métier, enfin rien de rien.

Il s’était entêté, il ne pouvait rentrer bredouille, cette vente était vitale pour eux, tant de travail et au bout rien c’était impensable. Après deux jours de vaines démarches, il avait dû se rendre à l’évidence et prendre le chemin du retour.

Pour lui le monde venait de disparaître, enfin son monde, c’est comme s’il avait dû constater que le soleil ne brillerait plus. Pris dans ses pensées et ses certitudes il n’avait pas perçu ce qui se préparait. Les vallées désertées, les mas à l’abandon, il était plutôt fier, eux ils tenaient, le confortant ainsi dans ses choix et ses décisions que personne n’osait contester.

Le départ de son aîné aurait dû être un signal, il n’en avait rien été, il l’avait cru dans l’erreur de céder à ce qui se passait là bas vers les villes, lui il savait…

Oui, il savait, il savait quand il fallait planter les légumes et les arbres en fonction de la lune, quand dans la clède les châtaignes étaient sèches, quand la pluie allait venir, ce qu’annonçait ce vent d’est, quand il fallait moudre les châtaignes en fonction du vent dominant pour que la farine ne prenne pas l’humidité.

Il ne vivait pas dans la nature, il en était l’une des composantes, un maillon, presque l’un de ses arbres et là il se voyait renvoyé à son isolement, à son désert !

Pendant huit jours, il n’avait rien dit, se contentant de rester assis sur le banc de pierre le long de la façade, refusant de manger quoi que son épouse lui propose.

Tous faisaient silence, le père allait se laisser mourir…   

 

Puis après huit jours, il se remit au travail, mais le ressort était cassé, il ne parlait plus, ne se plaignait pas non plus, il avait manqué à son clan, il s’était trompé et par sa faute ils en étaient là, perdus, désormais il ne donnerait plus jamais d’ordre.

Voilà ce qu’Arthur et Jean Louis se racontèrent cette nuit là dans la fumée de ce petit café crasseux envahi de vapeur de tord boyaux, et de discours d’ivrognes.

 

Au petit matin, à leur réveil, avant de se quitter, ils burent un bol de café en faisant silence.

Puis ils se dirent qu’il allait falloir en mettre un coup pour s’inventer un nouveau monde où pouvoir vivre heureux.

Ils restèrent là un instant front contre front pris dans la chaleur de l’autre, c’est le sifflet du train au départ qui les sépara.         

Ils savaient qu’ils avaient du soleil et du vent dans leur tête, alors tous les espoirs était permis…

 

 

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-  Bon voyage. Avons trouvé la maison, enfin ce qu’il en reste

44.21.39.45° N

  3.55.56.26° W pour votre GPS

Maintenant sieste. Bye

Sent from my I Phone 14 h

 

 

 -  Au réveil un Vautour fauve de grande envergure tourne au dessus de nos têtes et des       lézards se laissent griller par le soleil.

 On se croirait au commencement du monde !

 

Sent from my I Phone 18 h 15

 

Il y a des nouvelles des enfants et toi tu ne me dis rien, t’es vraiment rien qu’un sauvage de coureur des bois. Je comprends que les indiens t’apprécient. J’m’en vas à Cheboygan t’en es ?

 

 

 

                                                                                                                         

                                                                                                                            DG Le Thivet la Massinière Mars 2012