Le passage de l’année 2010 à 2011 aura été marqué par l’appel du célèbre résistant Stéphane Hessel : "Indignez-vous !", et ce sont deux verbes, s’indigner et résister que nous allons explorer ce mois-ci.

 

S’indigner : employé le plus souvent de manière pronominale, ce verbe nous renvoie à l’indignation, c’est-à dire au sentiment de colère et de révolte que peut provoquer quelqu’un ou quelque chose ; on ne s’indigne pas de rien ; et quant Stéphane Hessel en fait une injonction, à l’impératif, il nous renvoie à la fois à une attitude, et à un objet.

Une attitude : être capable de s’indigner ; mais puisque l’indignation est un sentiment, cette attitude repose sur la capacité de ressentir, de s’émouvoir.

Pourtant, il ne s’agit pas de s’émouvoir pour la dernière bluette venue, ni pour un fait divers ou un mélo : il ne peut y avoir d’indignation sans objet, sans une raison sérieuse de se révolter.

Et, s’indigner, c’est se révolter contre l’indignité, terme extrêmement fort qui, après avoir désigné au 17ème siècle "l’exclusion d’un héritier ayant commis une faute grave contre le défunt", a pris, depuis le 19ème siècle le sens de "refus du droit électoral à certaines personnes", et plus spécifiquement au 20ème celui de "privation de certains droits civils ou civiques". Pendant la seconde guerre mondiale, "l’Indignité nationale est une peine sanctionnant les faits de collaboration avec l’ennemi".

L’indignité est donc chose grave, liée à la bassesse, à la vilénie, à l’infamie qui ne peut que susciter un mépris profond. Par son injonction : « Indignez-vous ! », Stéphane Hessel tente de ressusciter un sentiment, celui  qui nous pousse à nous révolter contre un manque de dignité. Etre digne, c’est mériter l’estime, la considération, c’est être humain ; être indigne, c’est démériter des valeurs inviolables de l’humanité.

Mais, s’indigner pourrait être vain, si l’on s’arrêtait à une colère soudaine et passagère. "S’indigner contre" doit s’accompagner d’une action dans la durée. S’inscrire dans la réaction ne suffit pas, car elle risque de s’envoler comme un feu de paille. Et pour faire durer l’action, rien de mieux que de "résister".

 

Résister : étymologiquement, c’est "s’arrêter, se tenir en faisant face, faire obstacle à…". Utilisé d’abord uniquement pour un être vivant, au sens de "s’opposer par la force à une personne qui fait usage de la force ou de moyens de contrainte", il signifiait aussi, sans complément, "se rebeller, refuser de se soumettre à une autorité". C’est la conjugaison de ces deux acceptions qui a donné le sens politique de "résistance" comme droit de résistance à l’oppression. Pendant la seconde guerre mondiale, ce mot avec une majuscule s’applique à l’action menée par ceux qui s’opposèrent à l’occupation de leur pays. Résister, ce n’est pas seulement se rebeller, ni refuser l’autorité et la contrainte, c’est faire face en se tenant droit, c’est agir !

 

Indignons-sous, certes, mais pour une cause forte et juste ! Et agissons pour résister à ceux qui l’empêchent d’advenir…