Il me semble, en premier lieu, que la poésie traditionnelle, enfermée dans un terrible ghetto pollué de certitudes, n'est non seulement plus à même de répondre aux exigences de notre temps mais s'érige également en arbitre du goût, en privant les auteurs de leur liberté d'expression et les lecteurs d'un véritable choix.
Si la démocratisation de la culture, telle qu'elle se fait jour sur Internet, présente certains inconvénients, elle n'en est pas moins un extraordinaire vecteur d'ouverture pour les artistes désireux de toucher un public plus large.
Ainsi, renouant avec une tradition déjà lointaine, la poésie redevient populaire comme au temps des troubadours et, libérée d'une médiation où officiaient piteusement des chapelles littéraires fossilisées et des censeurs obtus, retrouve ipso facto sa fraîcheur d'antan et se donne le droit de braver toutes les conventions et de canaliser toutes les audaces.
En deuxième lieu, l'aspect ramassé du poème se prête particulièrement bien au lectorat présent sur la Toile qui, au détour d'une visite sur un annuaire ou à la faveur d'une promenade sur un moteur de recherche, est confronté brusquement à un texte inconnu d'un écrivain inconnu, dans la matière duquel il va peut-être trouver des " armes de lumière ".
Enfin, l'espace offert si généreusement au poète le met en situation de mesurer en temps réel les réactions de ceux auxquels s'adresse son message et dont il a tout lieu quelquefois, lorsqu'elles apparaissent fondées, de s'inspirer des suggestions et des critiques.
Force est alors d'admettre, en conclusion, que, loin de nuire à la création poétique, la planète Internet en favorise au contraire l'émergence, et que le poète que je suis parmi bien d'autres, serait au fond mal inspiré de rejeter sans réflexion le merveilleux outil que celle-ci place entre ses mains.


Thierry CABOT


Thierry CABOT : " La Blessure des Mots ".
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