Ne pas hésiter à ne plus se voir soi-même pendant un temps
Epouser les variations climatiques
Prendre un bonheur de longue durée
Quitter les pénéplaines
Aller se faire tremper les pieds ailleurs
Revenir aux régions des lacs


Sortir
Déclencher le chien du fusil
Délacer la boîte temporale
Revenir aux endroits des écluses
Lever les panneaux des vannes
Céder le domaine


Incendier tout sentiment parasitaire
Jusqu’à la table rase
Parvenir à voir sans fermer les yeux
Prendre place sur le char d’Attila
Redevenir brutal
Retrouver cette essence de thym


Entrer en vigueur
Déplacer la plaque du continent natal
S’extirper des lagunes
Franchir le cordon
Devenir ce passeur tectonique
Visiter les récifs et voler dans la flore
Déshabiller du regard


Faire que les eaux aillent dans le sens du vide
Dans le sens du ventre
Jusqu’aux hanches
Jusqu’au bassin qui est le centre
Ne pas lâcher des yeux la colonne
Le squelette ensoleillé
Entrer en mer
Comme un ange


Ne considérer que le muable
Que le sable
Que la chambre des centres
Laisser venir à soi les vérités comme elles veulent
Comme elles peuvent
En arriver au paradoxe qu’«il règne une tranquillité d’ambulance»(1)
Suivre en aveugle le marqueur


Voir loin, très loin, très bien


Sortir des catacombes
Promener sa profondeur physique
N’épouser que des dames à licorne
Appréhender les espaces pascaliens
Dormir « dans l’air glacé les ailes toutes grandes » (2)


Amener tout ça au temple
Se mettre à écrire



(1) Claudel, « Kabouki » in "L’oiseau noir dans le soleil levant."

(2) Leconte de Lisle, « Le sommeil du condor » in Poèmes barbares.