Machinalement je regarde à nouveau ma montre ; ce n’est pas mon habitude, pas du genre à m’inquiéter facilement surtout qu’il n’y a aucune raison... Corentin est toujours à l’heure, ponctuel et prévoyant.
Parfois seulement, l’étourdissement de sa jeunesse, tellement la passion de son travail l’accapare… son envie d’apprendre, de faire… surtout de faire car la carrière qu’il a décidé d’embrasser (la chaudronnerie/soudure) et la fascination pour le métal qu’il rêve d’apprivoiser lui font souvent oublier l’heure et les bobos… Rien ne l’empêche d’être présent à ses cours et à son poste : les petites coupures de l’acier mordant où les coups de marteau sur les doigts… c’est le métier qui rentre ne cesse de lui répéter le prof principal !
Plus de 15 minutes que j’attends devant son atelier où il fait son stage de 6 semaines, obligatoire pour pouvoir accéder au bac techno.
C’est bizarre, l’atelier a l’air fermé. Mon portable sonne à nouveau ; c’est mon épouse qui son tour s’impatiente : que se passe-t-il, dit-elle ?
- Je ne sais pas.
- Mais ça fait presqu’une heure qu’il devrait être rentré ; et il reprend à 13 h 15…
- Je vais voir si l’atelier est fermé.
Au moment où je m’approche de la porte, un fourgon arrive dans la cour. C’est le patron. A ses côtés Corentin, tout heureux d’avoir aidé le boss à prendre une livraison. Surpris de me voir ici, il vient vers moi pour me saluer et voit bien mon inquiétude…
Après lui avoir expliqué que je récupérais mon petit-fils tous les jours pour le déjeuner, ce dernier se retournait vers Corentin en lui reprochant de ne pas l’avoir averti…
La joie de l’adolescent de pouvoir se mettre au service du patron avait été bien plus forte et il avait vite oublié que l’heure du déjeuner était proche.
Une livraison retardée, une route encombrée… et voilà : une heure de retard !
- Tu n’auras qu’à reprendre une heure plus tard lui lance le patron !
À la maison, le repas avalé en quatrième vitesse et voilà mon gaillard tournant en rond, prêt à repartir.
Et dire qu’il y en a qui pensent que les jeunes ne sont pas courageux !