Christique, christique ! Il va sans dire, mais je vais le dire quand même, que mon Christ à moi n'a jamais été embrigadé dans une religion...  Le Christ  et mai 68 et sont des mythes en ce que leur puissance symbolique est inversement proportionnelle à  l'épaisseur de leur réalité historique.

        La lecture des Evangiles m’a donné à penser que Jésus était au fond un brave type, un peu allumé certes, qui aurait dû être un peu plus branché sur les philosophes grecs,  malin comme un gourou pour mettre sa bande à contribution mais pas autant que le moindre de nos actuels politiciens; après tout, 3 ans de vie publique ça ne fait qu'un tout petit mandat ! Il est vrai que l'énergie qu'on dépense pour durer on ne la met pas à faire. J’aurais eu beaucoup de plaisir à le chambrer si l’on avait eu l’occasion de casser la graine…rien à voir en tous cas avec les exploiteurs du peuple dont parle Pierre ni avec les machos de tout poil, quand les princes et les prêtres à leur service (ou l'inverse selon les régimes )ont compris le profit à tirer du sermon sur la montagne. Certes on peut clabauder sur les capacités d'aliénation  du Christianisme mais des trois religions monothéismes, ce n’est pas la plus con  !
       Derrière le Christ se profile le divin et derrière le divin, la croyance. La question de la croyance est depuis toujours un faux problème. En effet, toute religion athée ou divine peut contraindre toute une population à l'observance de rites et ne s'en prive pas sitôt qu'elle dispose d'une parcelle de pouvoir temporel. Pourtant aucune ne peut vous imposer une croyance pour la bonne et simple raison que personne ne commande à son propre for intérieur, ce lieu difficile d'accès où les convictions se sédimentent à notre insu. La croyance ne relève pas du domaine de la volonté, elle s’impose d'elle-même comme l’évidence la plus en phase avec votre perception du monde. Comme une méthode Coué de la croyance, dans ma jeunesse christique, on m'enseignait à réitérer cette prière : "Je crois, Seigneur, mais augmentez ma foi!" Quelle ineptie! Comme si l'on pouvait réduire ou augmenter le volume de sa foi à la manière d'un soufflet de forge! On n'est pas responsable de sa croyance. Dans nos codes sociaux, lorsqu'en préambule oratoire on fait intervenir la volonté en déclarant, par exemple, à celui qui vous a grillé sauvagement la priorité: "Je veux croire que vous ne l'avez pas fait exprès". Ou comme le déclarait aujourd'hui Ségolène Royal : "Je veux croire que le fait pour le président de partager le  yacht deVincent Bolloré  n'est pour rien dans son désintérêt pour son concurrent Heuliez! ", on sait à quoi s'en tenir sur la profondeur d'une conviction s'appuyant sur la  volonté! 

            Pour ma part, un agnosticisme tranquille s'est imposé à mon évidence au sortir de l'adolescence..N'attendez  de ma part aucun signe ostentatoire et je déplore que certains croyants ne fassent pas preuve de la même retenue. 
           Aujourd'hui, 41 ans après 68, coincé entre l'obscurantisme religieux et  l'idolatrie légèrement écaillée du Veau d'Or, je prends toute la mesure de cet hommage lucide rendu par Pierre Danger à « ceux dont le plus beau cadeau qu’ils ont fait à l’histoire est d’être allé jusqu’au bout d’eux-mêmes en s’autodétruisant pour laisser place à une ère nouvelle dont absolument tous les fondamentaux seront à l’opposé des leurs (retour du religieux, culte de la rentabilité, etc.) »
             Dans le même temps, le pays consacre sans états d'âme un président divorcé deux fois... Une vie de bâton de chaise inimaginable chez un politicien d'envergure nationale au temps  de Charles de Gaulle et de tante Yvonne . Quel ingrat ! Lui qui use avec abondance de cette liberté des moeurs fraîchement conquise, a-t' il seulement pensé à dire: merci mai 68!

NB: Retrouvez les textes d'André Youx avec la rubrique "Rechercher"