Qui passaient leur journée au café
A causer de tout et surtout de rien
C'est pas la cousine Jeanne
Qui s'en plaignait
Vu que c'était elle
Qui remplissait les verres
Souvent elle remettait sa tournée
Sur le coup de quatre cinq heures
Elle sortait le tapis et des cartes
Histoire d'attendre l'apéro
Le soir quand ils rentraient
Ils ressemblaient à des tomates
C'est pas la cousine Jeanne
Qui s'en plaignait
Vu que c'était elle
Qui les vendait les tomates
Dans son petit commerce
Où l'on trouvait de tout
Sauf la place pour passer
Tous ces braves gens avec le béret
Ou la casquette vissée sur la tête
Regardaient le verre à Ia main
Sur le carillon passer le temps
Oubliant de rentrer pour souper
Et tant pis si leurs bourgeoises râlaient
C'est pas la cousine Jeanne
Qui s'en plaignait
Vu que c'était elle
Qui empochait les sous
Surtout les jours de foire
Le vingt deux de chaque mois
Le tonneau de rouge n 'y suffisait
Sans oublier les samedis de noce
Les mariés en tête du cortège
Lui rendaient visite
C'est pas la cousine Jeanne
Qui s'en plaignait
Vu que c'était elle
Qui la première embrassait le marié
Lorsque l'un de ces assoiffés
Passait l'arme à gauche
Les autres après le cimetière
Se précipitaient au café
Boire à la santé du mort
Pour se remonter le moral
C'est pas la cousine Jeanne
Qui s'en plaignait
Vu que c'était elle
Qui fournissait les fleurs
Après les avoir tous enterrés
Elle a fini par les rejoindre
Si de là-haut elle entend
Cette poésie écrite pour elle
Je ne crois pas qu'elle s'en plaigne
C'était la cousine Jeanne
De mes souvenirs du bas-bourg


Extrait du recueil " A l' ombre du temps"
Librairie chez Gibert à Poitiers et en dépôt au Château d'Avanton


NB: Retrouvez les textes de Jean Chevais avec la rubrique "Rechercher"