bar,ce garçon et moi. Il s'agit de se débriefer sur un inopiné passage à l'acte après une soirée bien arrosée mais assez consciente quand même, vérification faite.
Le problème, c'est qu'on est amis. Apres les banalités d'usage, on entre dans le sujet, pendant que comme dans les BD de Tintin, un diablotin et un ange se glissent sur nos épaules. Ca nous fait 4 témoins actifs, dans ce bar glauquissime, qui se trouvait être le seul au milieu de nos deux chemins, chacun d'entre nous ayant à faire après. A nous six, on est prêts à débattre, puisqu'apparemment il le faut.
C'est lui qui attaque: euh, tu te rappelles que j'ai une copine?
C'est bizarre comme ce genre d'information ne ressurgit que maintenant. Mon diable s'active: voilà qui est étrangement sorti de son esprit ce soir là. Un problème de connexion au cerveau en position allongée, parfois constaté sur les individus de sexe male mais pas toujours. Par ailleurs, mon diable précise que ce n'est pas mon ange qui l'a cherché, son diable nous est tombé dessus sans qu'on l'ai vu venir, mais nous étions assez ravis tous les trois.
De ce fait, mon diable lui dit: je m'en moque. A vrai dire, mon diable envisage de voir son diable en parallèle, ce qui ne plait pas trop à mon ange. L'ange a pris des grands coups sur la gueule de la morale récemment et ne croit plus à grand-chose. Le diable du coup, en a profité pour faire feu de tout bois sur la théorie « un tiens vaut mieux que deux tu l'auras ». Son ange sursaute, il ne peut pas, ça ne se fait pas, en tout cas, lui ne fait pas ça.
Très bien, pense mon ange. Mais dans ce cas, est ce que ton diable pourrait arrêter de me caresser le bras comme ça ? Le garçon m'explique toutes les bonnes raisons qui font que nous allons rester amis, mais que ce ne serait pas une bonne idée d'aller au delà. Je suis fondamentalement d'accord, trop d'amis en commun, et je ne crois pas à une relation avec lui. Néanmoins, mon diable serait assez tenté si on pouvait un peu simplifier les choses. Son diable est dans mon cou maintenant, ce qui n'aide pas à réfléchir.
Son ange, plein de bonne volonté, me dit: on se verra avec d'autres gens, et son diable ajoute, sinon je pourrai re-craquer. Mon ange se propose d'être le gardien du juste amis, no touch, parce que globalement, c'est ce à quoi je crois. (Mais que son diable lâche mon oreille). Nos anges s'entendent plutôt bien en tant qu'amis. Quant aux diables, on va essayer de les envoyer jouer ailleurs.
On se quitte sur cette conviction, qu'avec le temps nos anges vont l'emporter sur nos diables.
Sur le trottoir, c'est déchaînement des diables qui se disent au revoir à Palot-Land. Les anges détournent les yeux, et accordent une dérogation juste pour cinq mn. Finalement, mon ange se pointe et met en évidence l'absurdité du truc. Les diables sont défaits, on regarde nos pieds.
Trois semaines plus tard, on se revoit, seuls les anges sont là. Les diables apaisés, sont bien partis jouer ailleurs.


NB: Retrouvez les textes de Michèle Lessaire au moyen de la rubrique "rechercher"