Son impatience précipite ses découvertes. Écoutez la chanson vous dire que Marie-Lou a vu le loup avec quelques printemps d'avance et dites-vous que Marie-Lou est Bélier, même si la chanson ne le dit pas. Inutile de lui prêcher la prudence, ''prudence'' n'est pas Bélier. L'a-t-on mise en garde ? Elle n'a pas pris la peine d'entendre. Aurait-elle entendu que ça lui aurait plutôt donné des idées.
     Très tôt, la Bélier danse avec les loups. Jeunes loups, ils voient en elle une femme ambitieuse capable de booster leur carrière — ils parlent comme ça les jeunes loups. Elle les épingle caporal et va leur coudre du galon. Pour peu qu’ils soient des Bonaparte, elle en fait des Napoléon. Quant aux vieux loups de mers, ils n’auront de cesse avant de lui avoir trouvé un triangle dans le bermuda. Jeunes ou vieux, ils adorent en elle tout ce qui moutonne et tout ce qui frissonne. Ils en oublieraient le Petit Chaperon Rouge et le lit de la Mère-Grand pour le chemin de sa bergerie. Leur grand fantasme : tirer la chevillette de son désir pour voir tomber la bobinette de sa vertu. A part la biquette du Capricorne, la Bélier n'a pas sa pareille pour les faire sortir les loups du bois.

     Rien d'étonnant à ce qu'elle ait une meute à disposition. Selon l'humeur et les besoins du moment, elle s'y choisira un ami, un mari ou un amant. L'impulsion de son bon vouloir en décide. Car elle est, tout à la fois volontaire et impulsive. Elle est tout à la fois, celle qui propose et celle qui dispose. Retrouvons Marie-Lou après que son avancée dans la vie lui a donné un recule suffisant face à la gent masculine. L'expérience aidant, elle s’est doté d'un instinct plus sûr sans pour autant assagir son tempo. Toujours aussi pressée de vivre. Toujours briquet jetable, emballage perdu et amants de rechange. Toujours grand cœur, généreuse mais soupe au lait. Vous savez, celle qui monte, qui monte et déborde sur la plaque électrique répandant une odeur plus roussie que sécheresse égarée en automne.

     Pour le reste, la Bélier est une printanière. Un astre ne peut pénétrer dans son signe sans passer sur le point g de son zodiaque, alias point gamma pour les astronomes, origine du printemps. De quoi expliquer bien des choses.
     À commencer par une envie de s'éclater qu'elle partage avec les bourgeons. Mademoiselle Bélier c'est Mademoiselle Bourgeon. Ou Mademoiselle B tout court, parce qu'il faut faire vite et que les initiales lui vont bien. De même que les autres mots de la même famille tels initiative ou initiatrice. Combien de jeunes boutonneux sont venu guérir de leur acné dans ses bras !
     Car la Bélier bivouaque souvent à la source des longs fleuves pas encore tranquillisés. Vous en étiez encore au mont Gerbier des Joncs de votre parcours sentimental — impatient d'inonder, mais craintif de vos berges —, vous aviez beau savoir que les belles de nuit viendraient un jour s'y baigner, le complexe du puceau demeurait comme une appréhension d'explorateur face aux contrées à découvrir… Elle fut la première et prit les devants. Vous aviez rêvé qu'elle vous cède : elle vous a précédé. Bien entendu, vos petits boutons de jeunesse n'y ont pas résisté. Rien ne lui résiste.


     Un conseil, cependant : lorsque surgit la Bélier, n'en rajoutez pas trop côté sentiments. Dites-vous, par prudence, que cette nouvelle venue ne vous offre pas un roman, mais seulement une excitante nouvelle. Il sera toujours temps d'en attendre plus. Et, si elle passe comme une étoile filante, au lieu de vous désoler, faites un vœu : il sera exaucé. Car tel est son cadeau : l'ici et maintenant du bonheur. Une envie de jouer à saute-mouton par-dessus les feux de joie. Fille de feu et fille de la joie, la Bélier. Au sens le plus ardent et le plus noble. Non pas du feu qui couve sous la cendre, mais de la flamme qui soudain jaillit et crépite. Intarissable de désirs, inépuisable de confiance, la Bélier prend feu avec la même joie et la même impatience que le fleuve prend source... Écoutez-la, écoutez Louise de Vilmorin vous le dire :

     J'ai bien des fois brulé
     Mais de chaque incendie
     Un nouvel age est né
     Pour l'amour de ma vie.

     Louise était Bélier ascendant Bélier. Un pur produit du signe. On ne tergiverse pas. On agit, à chaud, sur-le-champ, qui ne répugne pas à être champ de bataille. Car nous sommes ici sous le regard de Mars, dieu de l'action mais aussi de la guerre. Celui qui préside aux destinées du signe. Qui donc a osé dire : Faites l'amour, pas la guerre ? Moi je fais les deux, et volontiers tout en un, répond la Bélier. Tout est combat, puisque tout se gagne, à commencer par les jeux de la séduction. Tout est combat jusque dans les ébats de l'amour. Rien moins qu'une tendre joute, l'amour ! Avec qui voulez-vous aimer ? Avec la plus ardente ? la plus impulsive ? la plus immédiate au plaisir ? Alors, c'est avec moi, vous dira la Bélier. Si vous me plaisez, je suis partante, moi qui ne rêve que de départs.

     Et c'est ainsi, sur un de ses coups de cœur, qu'elle vous épousera. L'annonce de son mariage fera du bruit dans le Landernau du zodiaque : Mademoiselle B comme Bourgeon, Mademoiselle qui s’éclate, va devenir Madame B comme Big-Bang ! Elle entre dans votre vie, et votre vie entre en expansion.