Je n’arrive pas à y croire ; qu’est-ce que tu fais ici ? Tu es revenu pour longtemps ? La dernière fois que je t’ai vu, j’étais près de la… Mais, je parle, je parle, je ne te laisse même pas le temps…
  • Oui, je vois, toujours aussi agitée : tact et discrétion !
  • Tu ne vas pas recommencer à me quereller ; moi qui me souviens avec un plaisir jubilatoire de nos palabres interminables. J’aurais préféré ne me souvenir que d’elles. Hélas, elles se sont raréfiées, puis taries, comme attirées en bas de…
  • Parce que tu ne t’es jamais demandé pourquoi j’étais parti ; et si loin que j’aie peu de chance de te rencontrer par hasard !
  • J’ai bien eu mon idée quand j’ai cessé peu à peu de voir ton visage en boucle sur l’écran de mes cauchemars. Dans les premiers mois de notre rencontre, l'attente de te retrouver le soir redonnait sens à mes si nombreuses occupations quotidiennes. Et puis, je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi, tu t’es mis à me détester. J’avais beau essayer de t’apprivoiser à nouveau, plus je faisais d’efforts, plus tu t’éloignais, comme au bord de la…
  • Mais arrête donc de ressasser ! Plutôt que de t’attabler devant la liste de tes récriminations, écoute-moi donc un peu !
  • Je voudrais bien t’écouter, mais tu ne dis rien. Je ne sais même pas ce que tu as fait pendant toutes ces années, où tu étais… Le mal que je me suis donnée pour ne pas flancher, ne pas perdre la boussole, essayer de t’oublier. Mais mes nuits laissaient émerger les rhizomes oniriques les plus délirants, jusqu’à ce que je ne puisse plus y tenir, jusqu’à ce que je n’aspire plus qu’à une chose, la…
  • Ça suffit maintenant, tu veux vraiment me faire culpabiliser. J’aurais bien dû m’en douter, quel idiot que de continuer à espérer. Je t’ai fui jusqu’au bout du monde, voyageant sans cesse, de bateau en avion, de bastingage en…
  • Evidemment, toi, tu pouvais te promener, tu en avais les moyens ; moi, il ne me restait que Poitiers, à peine les moyens de me payer un billet de train ; et pour aller où ? Alors, je trainais autour de la gare, peut-être avec un secret espoir de voir ta silhouette se profiler parmi les inconnus. Et je montais jusqu’à la…
  • Ah, tu sais, par moments, je me demande si tu n’aurais pas mieux fait d’en sauter une fois pour toutes. A quoi tu t’accroches à la fin ?
  • Mais enfin, à ce mot qui m’échappe… Si je l’avais trouvé, je n’en serais certainement pas là.

  • (Dangereuse passerelle…) Viviane Youx, 15 mars 2008