Pour le prix de sa chanson
Il emportait en rançon
cachée sous sa redingote
l'âme de la plus dévote

Chimène, Chimène
A quoi rêves-tu ?
A quoi donc te mène
Tout ce temps perdu
Resteras-tu fille
Ou, Dieu nous pardonne
Malgré ta famille
Te feras-tu nonne
A la cathédrale
Ninon s'est mariée
On y vit chanoines
Et les beaux quartiers
Sa cadette aussi
Eut de belles noces
Les filles d'ici
Se marient précoces
As-tu quelque peine
ou trop de vertu
Chimène, Chimène
A quoi rêves tu ?

Ma mère, Ô ma mère
Tous vos boniments
Ne sont que chimères
J'ai pris un amant
Je l'ai pris bellâtre
Pour ma vanité
Le prendrai mulâtre
Pour vous embêter
Prendrai les maris
De toutes ces cailles
Qui font tant de bruit
De leurs épousailles
Que je les déniaise
Et dans quelque temps
J'aurai à mon aise
Un vivier d'amants
Et plus d'adultères
Si le corps m'en dit
Ma mère, Ô ma mère
Que n'en peut mon lit

Chimène Chimène
Fille sans mari
A quoi donc te mène
Pareille folie ?
Quel démon te hante
Pendant ton dormant
Qui te veut méchante
Qui te va traînant
Des portes du songe
Aux lieux de luxure
De bonimensonge
En malaventure
Prends ton scapulaire
Courons à l'église
Qu'on t'avépatère
Et qu'on t'exorcise
Puis ferons neuvaine
Pour que Radegonde
Chimène, Chimène
Te sauve du Monde

 

Ma mère, Ô ma mère
Vos saintes breloques
Ne sont que chimères
Les démons s'en moquent
Celui que je hante
Beau comme blasphème
C'est Lucifer même
Dans un corps d'infante
Il boit l'eau bénite
Du grand baptistère
Trousse carmélites
Pendant leurs prières
La cuisse n'y touche
L'âme qui gémit
Comme je me couche
Il me fait mon lit
Entre neige et feu
Ma mère, Ô ma mère
Le ciel a beau faire
L'enfer a beau jeu